
La prévalence
Selon la CIIVISE (Commission Indépendante sur l’Inceste et les VIolences Sexuelles faites aux Enfants), en France, 160 000 enfants sont victimes chaque année de violences sexuelles et notamment d’inceste : attouchements ou viols (impliquant une pénétration vaginale, anale ou buccale), soit 1 enfant sur 10.
L’ampleur du phénomène n’est malheureusement plus à prouver !
Il y aurait tant à dire, j’ai choisi de mettre en avant certains aspects du phénomène.
Un aspect encore méconnu : 30 % à 40 % des agressions sur enfants sont commises par d’autres mineur-e-s1.
La prévention
A faire dès le plus jeune âge en :
- installant des limites entre les générations
- respectant les places de chacun
- respectant les espaces de chacun
- respectant l’intimité et les besoins de chacun
- ayant de la pudeur
- encourageant l’enfant à écouter son corps
- écoutant la parole de l’enfant
Pour autant, il ne s’agit pas de parler sexualité à des enfants qui n’en sont pas là, ce qui serait intrusif. Il s’agit de s’ajuster à leur rythme.
Enfin, avec les adolescent-e-s, il est tout particulièrement important d’avoir des échanges sur la question du consentement (vidéo tasse de thé : https://www.youtube.com/watch?v=S-50iVx_yxU).
Les mécanismes à l’œuvre en cas de violence sexuelle
1. La sidération : face à une situation dangereuse, le cerveau reptilien (protecteur) est actif. Le mouvement instinctif est soit la fuite soit le figement. Bien souvent c’est le figement qui est à l’œuvre dans les situations de violences sexuelles. C’est pourquoi les victimes ne sont pas en mesure de dire « non » ou de se débattre.
2. La dissociation est un mécanisme de défense, de protection, qui permet au psychisme de ne pas ressentir la douleur, celle-ci étant trop insoutenable. La personne « sort de son corps », se détache alors d’elle-même et de la situation.
3. L’amnésie traumatique totale ou partielle est une conséquence de la dissociation. Elle peut durer pendant parfois plusieurs années. Ainsi, la personne n’est pas en mesure de raconter l’agression (y compris à la police). Il y a parfois de vagues sensations mais parfois il n’y a rien. C’est une conséquence normale du traumatisme.
La violence sexuelle est un traumatisme corporel, sensoriel et psychique. L’association SVS2 parle de « bombe à fragmentation ». Elle vient faire exploser tout un système.
Au niveau du corps et des sensations : du fait de la dissociation, la personne n’est plus en contact avec son corps. Ainsi le cerveau déconnecte le corps, les sensations ne sont plus des indicateurs fiables. Le corps est normalement une boussole, un baromètre qui nous permet de prendre des décisions, de savoir si c’est bon pour nous ou pas, si on n’aime ou on n’aime pas. Avec les violences sexuelles, tous les repères partent en éclats.
Les émotions qui dominent suite à des violences sexuelles sont : la culpabilité, la honte et le dégoût.
La reconstruction
- par un travail à partir de la parole : reconnaître le traumatisme et l’ampleur des conséquences de ce traumatisme, exprimer ses émotions et travailler notamment la culpabilité et la honte
- par un travail spécifique sur le traumatisme (IMO3/EMDR4, l’hypnose, l’EFT5)
- par un travail corporel
L’objectif : poser des limites, se reconnecter à son corps, retrouver de la confiance en soi, retrouver de la souplesse et de la légèreté dans les relations, avoir une parole juste, vivre des émotions appropriées aux situations, récupérer son énergie vitale, retrouver son identité et son intégrité.
ZOOM SUR L’INCESTE
L’inceste ne pourrait avoir lieu sans un climat incestuel. L’incestuel :c’est ce qui fait passer les choses pour normales quand elles ne le sont pas, qui efface les frontières, qui expose les enfants à l’intimité des adultes, qui crée de la confusion générationnelle, qui valide pour des raisons médicales ou artistiques des substituts à l’inceste… c’est un inceste sans passage à l’acte.
Comment repérer un climat incestuel ? 12 critères proposés par le CIIVISE6 :
- la non autorisation à penser par soi-même
- l’intrusion dans l’intimité
- la confusion des places
- les confidences concernant la vie affective et sexuelle
- la proximité physique excessive
- l’attention excessive au corps du jeune
- la promiscuité
- l’attention excessive à la sexualité du jeune
- la sexualité par procuration
- le non-respect d’un lieu intime pour la toilette du jeune
- l’exhibition
- le fait de dormir dans la chambre parentale
1 Rapport sur la prise en charge des mineurs auteurs d’infraction à caractère sexuel (MAICS) par Marie Romero pour la direction de la protection judiciaire de la jeunesse.
2 SVS : Stop aux Violences Sexuelles
3 Intégration par les Mouvements Oculaires
4 Eye Movement Desensitization and Reprocessing
5 Emotional Freedom Technique
6 Critères proposés par Moltrecht et al., in Rapport à la CIIVISE, p.129
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